Un balayeur noir, un vrai français tout noir...
Le balayeur tout seul,
le balayeur tout noir
Le balayeur était seul.
Tout seul.
Il était noir.
Tout noir.
A la lumière écarlate qui lui venait du ciel,
Il répondait: "Bien sûr, je suis là,
Bien sûr je suis seul,
Bien sûr je suis un nègre,
Bien sûr, je suis heureux."
Le pauvre bougre qui attendait encore
Se leva afin de se tirer du corps
Les bottes noires de boue et de désillusions
Qu'il traînait sur le sol avec moins de passion
Qu'hier encore quand il chantait si fort
Je t'aime, je t'adore, tu es ma seule raison
Devant un peuple blanc et rouge de colère,
Devant un peuple tout noir et bleu de désespoir,
Devant une femme forte qui riait aux éclats,
Eclaboussant les autres de son rire irritant ;
Tout au fond de la rue, sur un trottoir tout noir,
Il y avait un homme, un balayeur tout noir,
Qui attendait, sans doute, sur le bord du trottoir
Tout près de son balai, une lueur d'espoir…
LUGGUY GUY- JOSEPH
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Texte poétique publié dans "EMPREINTES" revue de la TAVERNE AUX POETES numéro 3